Eotopia

Cet écolieu accueille aujourd’hui plus d’une cinquantaine d’arbres fruitiers. Notre design, qui impliquait moins d’arbres afin de garantir l’espacement idéal de la forêt comestible, prend en compte les dynamiques d’eau sur le terrain, une période de de plus en en plus grande de sécheresse l’été, une terre lourde et argileuse, des habitant.e.s très pris.e.s par leurs tâches quotidiennes ayant peu de temps à dédier aux plantations.

Le processus d’implantation

Le projet de jardin-forêt implanté au sein de l’écolieu Eotopia à été mené en plusieurs phases. Une première phase a consisté à récolter les observations des habitant.e.s. Dans un second temps nous avons croisés leurs informations avec une  analyse fine de l’ensemble des composantes du biotopes. Pendant 3 jours nous étudions les différentes caractéristiques du lieu appréhendées sur différentes échelles, du climat général (type tempéré océanique dégradé) aux micro-climats, nombreux de part l’hétérogénéité du site. Mégaphorbiaie, sous-bois humide, ripisylve, taillis, étang, lisières forestières, haies bocagères, noues, potager et prairies cultivées, ronciers, arbres isolées, bosquets, forment un tissu entremêlé de biotopes hydrophiles (qui aime l’eau). Ils font d’Eotopia un lieu habité et apprécié des oiseaux. D’après les habitant.e.s plus d’une trentaine d’espèces ont été recensées sur le site. On y croise aussi régulièrement le grand lézard vert, le renard, la cigogne blanche et plusieurs espèces d’amphibiens dont le crapaud commun. Au printemps, des nuages de libellules de toutes les couleurs y prolifèrent les années humides aussi bien que les grenouilles, coassant jusqu’au milieu de la nuit. Après la saison des asperges sauvages (ornithogales) qui fleurissent dans l’humus des érables, le rossignol vient à son tour chanter pour la période estivale, et enchanter les nuits des habitant.e.s. 

Au coeur du lieu une mégaphorbiaie, biotope composé de plantes vivaces hautes (Guimauve, Berce) est entourée par un boisé de charmes et d’une lisière forestière. Après réflexions et croisements des besoins humains avec les caractéristiques du lieu, la zone s’avère être la plus favorable à la plantation d’un verger. La problématique principale étant la capacité très importante du sol à retenir l’eau, très argileux voir glaiseux par endroit. Un sol qui retient l’eau n’est pas une bonne chose pour les racines des arbres fruitiers dont les abricotiers, les pêchers, les cerisiers et les pruniers qui préfèrent nettement les sols drainés. Nous achetons donc sur conseil d’un ami pépiniériste, des porte-greffes adaptés aux sols glaiseux. La multiplication des fossés et des noues paysagères est tout de même sollicitée pour drainer le site lors de la période hivernale, où le site se retrouve gorgé d’eau. Puis la technique des mulch végétaux est choisies pour commencer le processus d’aggradation du sol aux endroits prévus pour la plantation. Objectifs : Alléger le sol en formant une belle couche d’humus  issue de la décomposition de matières organiques. Nous choisissons l’ortie, la consoude, les feuilles de tilleul et le fumain* (voir notre article sur l’utilisation du fumier humain), matières présentent en abondance sur le site. Nous installons le mulch sur une couche épaisse de cartons  (voir prochainement notre article sur l’utilisation du carton au jardin) en octobre-novembre et laissons les micro-organismes du sol décomposer et travailler le mulch tout l’hiver. À la sortie de l’hiver, le mulch de 30 centimètre s’est décomposé, ne laissant qu’une fine couche de foin  et de tiges sur la couche de cartons. En-dessous, on plonge les doigts dans la terre. Elle est meuble et noire. Elle a une texture « couscous » : le complexe argilo-humique est en formation. 

À cet endroit-là, au début du mois de mars nous plantons les fruitiers encore en dormance en leur aménageant une belle fosse de plantation carrée. Cela évitera aux racines de tourner dans la fosse et étouffer l’arbre sur lui-même par la formation d’un épais chignon (une vidéo sera bientôt publiée sur ce sujet). Cette fois nous décidons d’appliquer un pralin sur les racines mise à nues des arbres fruitiers livrés par la pépinière. (voir notre article sur le pralin).  La plantation faite, nous semons au pied de chaque arbre un mélange de plantes fixatrice d’azote. Par ailleurs nous disposons tout autour de l’arbre du fumier , du fumain, du compost décomposé ou de l’urine à distance du pied. Là où les branches du houppier s’arrêtent (voir prochainement notre article sur le jetting line).  Le verger prend vie et nous commentons la trame verte formée entre celui-ci, la forêt et le bosquet de charmes. La lisière formées de ronces, de rosiers sauvages,  d’aubépines et de prunelliers nous bouchent la vue tant elle est dense. Elle borde la forêt, et nous cachent bien des choses. Le lendemain, on entreprend d’aménager un accès pour s’y promener. Âgée d’environ 70 ans, la forêt est encore bien touffue et par endroit nous découvrons un duo de saule blanc. Leurs troncs boursouflés se muent en la paume d’une main dont les branches s’élancent vers le ciel comme ses doigts. Des trognes. L’un d’eux forme de son tronc, un joli banc. Après les avoir quittés, nous retrouvons un peu plus haut, dominant une butte dont il en retient la terre, un autre saule blanc. Une trogne majestueuse. Le roi de la forêt du bas humide et fraîche dont les pieds sont recouverts de mousse et de lichens. Quelques minutes plus tard, nous rencontrons le roi de la forêt du haut, un chêne. Avec vue sur le bocage charolais, la plaine de la Loire et en contre-bas le verger tout juste planté.  Nous reviendrons l’année prochaine pour constater l’évolution des plantations. Puis nous repasserons par ici, où il y a 70 ans il n’y avait que pâtures, pour nous enforester. 

Biotope régional (localisation)

Eotopia est en Bourgogne Franche-comté, à quelques kilomètres à peine de la Loire. La terre y est riche et argileuse, doucement vallonnée. Le climat y est réputé pour être plus doux grâce au fleuve.

Plan vue d’en haut

Plan schématique de l’implantation des arbres

Les arbres de la canopée sont les premiers à être plantés. Autour d’eux l’herbe est remplacée par des couverts végétaux afin d’améliorer la structure du sol et fournir quelques feuilles à la cuisine. Nous semons également des engrais verts (alfa alfa, trèfle blanc, luzerne, moutarde) et des plantes mellifères.